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Aqabat-Jaber, Vie de passage, by Marie Appert (Positif)

01.10.1987

AqabatJaber - (Vie de passage) Long métrage français (86 minutes) de Eyal Sivan, photographié par Nurith Aviv et Raymond Grosjean, tourné en novembre 1986 dans le camp de Aqabat Jaber en Cisjordanie.
Une porte s’entrouvre pour appeler le Mukhtar. Porte ouverte au cinéaste. Une femme pose gauchement pour les dernières photos. Connivence. De rune à l’autre, Aqabat Jaber, Vie de passage. Mais aussi présence de passage du cinéaste dans le camp de réfugiés palestiniens. Quand bien même la rencontre fut difficile, le film en conserve les regards complices, la mise en scène de leur quotidien voulue par les habitants eux-mêmes, l’humour de l’enfant qui prétend dans un éclat de rire ne jamais avoir entendu le mot réfugié. Mais encore, travail de sociologue doublé d’œuvre de cinéaste quand la parole recueillie en interview parait en voix-off accompagnant l’auteur des propos dans sa marche donnant permanence à ceux-là et sens à celle-ci : dignité de survivre contre fatalité d’impuissance. De la porte ouverte à la caméra aux photos d’adieu, fellahs et bédouins, hommes et femmes, mots et images disent gravement la condition de ceux qui ont perdu leur terre : “L’homme n’est rien sans sa patrie”. Revendications, les provisoires maisons en pisé, comme le mot réfugié, omniprésent, douloureusement répété pour rappeler l’humiliation perpétuée depuis trente-huit ans, qui porte en lui sa réciprocité : l’existence d’une patrie. Qui dit exil dit retour. On pourrait craindre parfois que le film dans sa construction adroite et chaleureuse ne nous fasse oublier les circonstances politiques si l’on ne jugeait plutôt comme Henri Cartier-Bresson qu’il est “au-delà de la politique” tant les êtres bafoués y sont dignes et fiers.
Marie APPERT